hantise

Melfice passait par ici en bâillant et en s'étirant, apparement encore à moitié réveillé de la sieste qu'il venait de faire.
Quand il aperçut Perséphone, un sourire apparut sur son visage et il approcha dans sa direction.

Oh ça ne va pas? Tu es blanche comme la mort!
Oops, tu es morte, c'est vrai...

Après cette petite blagounette foireuse qui l'avait rendu fier, Melfice s'adossa contre un arbre, comme à son habitude.

Tu sais que tu planes? C'est quoi le nom de ta drogue que j'essaye?
Bon, j'arrête la méchanceté, c'est pas drôle avec toi, tu ne peux pas me foncer dessus en voulant me tuer.
Alors petite Perséphone, quoi de... neuf si je peux dire?

Persé tourna un regard mort vers Melfice.

-Toi aussi tu veux planer? ** toi aussi tu veux mourir??**Tu veux que je t'aide? dit-elle sans méchanceté aucune.

Elle flotta vers la berge et se posta devant Melfice. Elle lui montra le lac du doigt.

-C'est ici que mon âme a quitté son corps...Ici tu vois? Et mon âme est ici devant toi.. Mais où est mon corps? Ou est -il?Encore à pourrir dans le lac...conclue t'elle sur un ton morne. Et moi, je fais la même chose ici. Mais quand me laissera t'on partir?

Melfice soutint le regard du fantôme et sourit légèrement après avoir entendu sa proposition.

Non merci, je n'ai aucunement envie de mourir...
Vois-tu, la vie est ce que j'ai de plus précieux. Tu te rends compte, avec toutes les possibilités d'être qu'aurait pu concevoir mes parents, c'est moi qui suis né.
L'une des question existencielles que j'adore me reposer. Merveilleux, n'est-il pas?

Le jeune homme alla lui aussi en direction de la berge et dit :

Si ton corps est au fond du lac, ça fait longtemps qu'il a dû se faire manger par les poissons tu sais...
Et tu ne pourras peut-être plus repartir...
Tu as apparement choisi la vie de fantôme plutôt que la mort.
Je ne pense pas que tu puisses revenir sur ta décision...

-Oui mon corps est sans doute dans l'estomac de ses fichus poissons,murmura t'elle d'une voix caverneuse. Je n'ai donc même plus de corps à présenter pour que l'on me laisse passer dans l'autre monde.... Sauf si...

Melfice qui tournait le dos au fantôme pour faire face au lac sentit un frisson glacé lui parcourir l'échine. Le fantôme était contre son dos et l'empêchait de bouger en ayant passé son bras autour de l'épaule du Serdaigle. Perséphone lui sussura à l'oreille sur un ton inquiétant:

-Sauf si tu m'aides...

Melfice laissa un long soupir s'échaper de sa bouche.
Il était sûr que Perséphone allait en venir à ce point fâcheux.

Non, je ne peux pas t'aider, tu le sais très bien.
Il n'y aurait qu'un seul moyen, et ayant entendant ma philosophie sur la vie que je viens de t'énoncer, je pense que tu connais déjà ma réponse...

Le garçon se transforma soudain en aigle pour se défaire de l'emprise du fantôme, puis reprit sa forme naturelle un peu plus loin, soucieux et réfléchissant.

Qui as-tu envie de voir le plus mourir? demanda-t-il avec un sourire proche de la psychopathie.

Le spectre, qui n'eut guère l'air d'etre surpris, laissa s'échapper l'aigle et se retourna pour à nouveau faire face à Melfice.Elle lui rendit son sourire psychopathe.

-Il m'importe bien peu de savoir qui mourra.

Elle haussa les épaules.
-Le monde des vivants m'importe bien peu. Toi, Cycy, frost ou Laika... Du pareil au même... Vous n'êtes qu'une bande de corps ambulants pour moi.

Elle fit quelques "pas" vers Melfice.
-Et toi? Tu refuses de m'aider. Mais peut-etre carresses tu la perspective qu'en m'aidant moi même je t'aide?

Un rire sépulcral s'échappa de sa gorge. Melfice ressentit des petits picottements sur sa peau.

-Un nom... murmura t'elle

Melfice ne souriait plus. Le fantôme qui lui faisait face lui faisait maintenant pitier. Il haussa les sourcils et dit :

Imbécile...tu n'étais pas si différente de la bande de corps ambulants auparavant.
Tu vois, étant vivante, tu étais assez spéciale, certes, mais je t'aimais bien.
Désormais, reprit-il avec un grand sourire, je pense pouvoir être sûr de moi en disant que je n'éprouve plus que du mépris à ton égard, car, vois-tu, contrairement à toi, j'aime tous les gens de cette école et je ne veux la mort de personne...
Alors ton nom, tu sais où tu pourrais te le mettre si tu étais encore vivante.

Un rire profond et sépulcral s'échappa de la gorge de Perséphone. Melfice sentit un frisson désagréable lui parcourir le corps.

-C'est cela... Méprise les morts... Tu marcheras un jour dans leurs rangs et tu finiras par comprendre.

Elle fit quelques pas plus avant vers Melfice.

-Pauvre fou... Me crois -tu dénuée de tout sentiment? Croit-tu que la mort a asseché la moindre bribe d'émotion?

Elle baissa la tête et laissa échapper un rire sans joie.

-Cruel jugement que voilà....murmura t'elle d'une voix à peine plus élevée qu'un souffle.

Elle releva soudainement la tête. Melfice fut frappé par son regard inébranlable et mort. Elle esquissa un sourire sans chaleur puis disparu brusquement pour réaparraitre derrière l'épaule du Serdaigle et lui sussurer à l'oreille:

- Viens donc mourir un peu avec moi au lieu de vitupérer dans le vide sur ce que tu ne connais pas...Ta mère ne te manque pas? Moi je peux te dire qu'elle se languit de ton absence. Elle m'a demandé de te mener à elle... Oh rassure toi.. Ce n'est qu'une visite. Je te ramènerais ici réintegrer la chair qui t'es si chère...Tu retrouveras bien vite ton venin très cher petit Serdaigle...

Melfice fixa attentivement Perséphone quand celle-ci lui parla de sa mère, puis il ne put s'empêcher d'éclater de rire.

Mais ma chère, je ne méprise pas les morts, ce n'est pas parce que j'en méprise une qu'il faut généraliser...
Cependant, réfléchis un peu, si je te croyais dénué de sentiments, crois-tu que je t'en voudrais d'avoir dit les mots qui sont sortis de ta bouche tout à l'heure? Non tu vois, nous sommes en plein dans le "pourquoi je te méprise" ...

Le Serdaigle s'étira longuement et fit craquer ses cervicales, un petit sourire apparaissant sur son visage.

Mais ce qui me fait le plus rire dans tous ça, c'est que tu prétends avoir vu ma mère et même qu'elle t'aurait dit de "t'amener à elle"...
Or, étant fantôme, tu ne peux évidemment pas avoir pu parler avec ma mère...
Ensuite, je sais très bien que son désir le plus cher est de me voir la rejoindre le plus tard possible...

Le sourire s'agrandit sur le visage de Melfice et celui finit par dire :

Et sache que je connais certainement beaucoup mieux le monde des morts que tu n'oserais même le penser.

Perséphone haussa les épaules devant l'impertinence du Serdaigle.Il ne la croyait pas? Très bien, qu'il en soit ainsi. Elle n'allait pas insister pour une affaire qui avait une importance mineure pour elle.

**Tant pis pour sa mère. Elle n'avait qu'à se faire aimer davantage par son fils. Je voulais bien rendre un service, mais celui me parait plus ennuyeux que prévu. Ces vivants font vraiment des histoires de tout !**

-Très bien. Tu as raison. Tu connais tout , tu sais tout. et je mens "evidemment", dit-elle d'un ton dénué d'émotion. Garde le "pourquoi" de ton mépris pour toi. Il ne m'interresse guère. Qu'en ais à faire de ce qu'un individu comme toi pense?

Perséphone se retourna et flotta vers le lac. Elle s'accroupit et posa sa main à plat sur la surface de l'eau. Sa silhouette commença à perdre de sa matérialité . Elle devint de plus en plus brumeuse.

**A quoi bon discuter avec un mur? Autant retourner dans ce monde " qu'il connait si bien" **